L’épuisement professionnel des professeurs
Le burnout toucherait entre 17% et 28,7% des enseignants selon des études européennes (Source : innovation-en-education.fr).
Il touche le plus souvent des enseignants qui ont une forte conscience professionnelle, qui investissent beaucoup de temps et d’énergie dans leur métier, dans un contexte où les moyens à leur disposition ne sont pas suffisants pour atteindre les objectifs qu’on leur assigne.
On leur demande ainsi de faire réussir tous leurs élèves. Cette pression les conduit à ignorer les symptômes précurseurs du burnout, jusqu’au jour où ils n’y arrivent plus.
Il y a souvent un événement déclencheur du burnout, la fameuse goutte qui fait déborder un vase déjà bien plein, et le niveau de stress supportable est dépassé.
L’épuisement professionnel se manifeste alors par une immense fatigue, des symptômes dépressifs, « le corps lâche ».
Dans les mots de mes clients, le burnout se manifeste avec ces mots : “je ne peux pas y retourner”. Le seul fait de passer devant l’établissement, ou d’ouvrir un mail professionnel, déclenche une forte anxiété.
Et la reconversion professionnelle semble s’imposer comme la seule issue à l’enseignant pour protéger sa santé mentale, sa santé tout court.
Les étapes d’une reconversion après un burnout
La nécessaire phase de repos post-burnout
Face au vide angoissant que représente la fin possible du métier d’enseignant, souvent pratiqué depuis plusieurs années, beaucoup de professeurs touchés par le burnout cherchent rapidement des solutions.
Réseaux sociaux, recherches internet, salons de l’emploi et de la formation, l’enseignant en burnout cherche fiévreusement des pistes de reconversion pour l’après. Mais procéder de cette façon peut s’avérer contre-productif pour plusieurs raisons :
- Le corps n’a pas encore récupéré, on manque d’énergie, de discernement, avec le risque d’opter pour un changement rapide alors qu’on n’est pas encore prêt, et de s’effondrer à nouveau.
- La recherche de pistes sans avoir d’abord exploré ses motivations, ses compétences, ses appétences, est peu fructueuse, car il y a toujours des critères qui bloquent, ou bien on ne se sent pas assez compétent pour oser répondre aux offres d’emploi potentielles.
Un burnout nécessite de plusieurs mois à plusieurs années de repos et de soins. La phase de récupération est essentielle. Croiser des approches complémentaires peut être bénéfique pour aller mieux. La réflexion professionnelle viendra en parallèle, quand le niveau de fatigue et d’anxiété auront raisonnablement diminué pour la rendre possible. Obtenir un congé de longue maladie, puis si besoin un congé de longue durée, sont certes des démarches pénibles, mais protectrices, pour se donner de le temps de se reconstruire.
Faire le point avec un bilan de compétences
Faire le bilan de ses expériences, le tri de ce que l’on veut garder, de ce que l’on ne veut plus. Analyser ses nouveaux besoins après le burnout, pour ne plus jamais avoir à revivre cette phase difficile. Faire émerger ses motivations, et pas seulement celles qui poussent à quitter une situation insatisfaisante, mais aussi celles qui donnent envie d’aller vers quelque chose de nouveau ou de différent.
Autant d’étapes indispensables pour construire ensuite un projet professionnel en adéquation avec son projet de vie.
Le bilan de compétences est un cadre sécurisant qui donne le temps et les repères nécessaires pour structurer cette réflexion de fond. Surtout, les échanges avec votre conseiller vont vous permettre de prendre du recul, et de bénéficier d’une écoute bienveillante. Cela n’est pas toujours possible avec son entourage direct, qui, s’il est bien intentionné, peut également être maladroit.
A raison d’une session par semaine ou toutes les deux semaines, vous avancez progressivement vers plus de clarté.
Vous explorez plusieurs scénarios pour déboucher généralement sur 1 à 3 pistes réalisables. Enfin, vous construisez avec votre conseiller un plan d’action contenant les différentes étapes pour réaliser votre projet de reconversion.
Se former pour acquérir une nouvelle qualification
Les enseignants pensent souvent qu’ils ne savent rien faire d’autre qu’enseigner. Le bilan de compétences permet de les aider à identifier de nombreuses compétences transférables à d’autres secteurs professionnels. Il peut cependant s’avérer nécessaire de compléter ces compétences avec des compétences métier spécifiques, par le biais d’une formation. Surtout, les enseignants ont un atout pour réussir : ce sont des professionnels de l’apprentissage.
Là encore, la recherche d’une formation ne doit pas constituer le point d’entrée d’une réflexion de réorientation professionnelle. Elle vient dans un second temps, quand les éléments cités plus haut ont été explorés en profondeur.
Le financement d’une formation pour les fonctionnaires de l’Education nationale est souvent un frein à leur évolution professionnelle. La mobilisation de leur droits à la formation, ou compte personnel de formation, est soumise à l’autorisation de leur administration, et plafonnée à 25€ TTC par heure, et 1500€ pour un même projet et par année scolaire. (source : https://www.education.gouv.fr/)
Les modalités de financement possibles vont également découler du projet choisi.
Les secteurs de reconversion professionnelle pour les professionnels de l’éducation
Les enseignants ont tous des profils et des expériences différentes. Il n’y a à priori pas de limite aux secteurs d’activités qu’ils peuvent viser.
Se reconvertir dans la fonction publique
Lorsque les contraintes financières sont fortes, que le maintien du revenu est prioritaire, se réorienter à l’intérieur d’une des trois fonctions publiques (d’Etat – Territoriale – Hospitalière) limite la prise de risque.
A deux conditions, parfois trois :
- Etre prêt à préparer un concours
- Etre patient : le calendrier des concours peut augmenter le délai pour concrétiser le projet de changement professionnel.
- Etre mobile : les postes vacants ne sont pas forcément dans son secteur géographique.
Une de mes clientes avait particulièrement mal vécu son concours pour devenir enseignante. Elle n’a pas eu envie de travailler dur pour préparer le concours, puis de s’exposer à nouveau à un jury, et de risquer l’échec.
Une autre professeure des écoles a décidé de préparer le concours de greffier, elle a attendu l’année suivante pour le passer, et l’a obtenu.
Il reste également les candidatures directes sur des postes vacants. Mais le syndrome de l’imposteur freine souvent les candidats qui ne cochent pas toutes les compétences attendues. Et se pose aussi la question du détachement, pour quitter son poste et rejoindre un autre emploi dans la fonction publique, complexe en terme de calendrier et d’autorisation.
Créer son entreprise dans un métier passion
C’est un choix qui attire souvent les enseignants, motivés par la transmission, le bien-être, l’accompagnement par exemple, mais aussi des métiers plus manuels. J’ai ainsi accompagné une professeure des écoles qui voulait devenir ébéniste, une autre productrice de pâtes fraiches, et une professeurs de lettres qui s’est lancée dans un CAP de couture.
L’avantage de ce type de choix peut être la possibilité de cumuler d’abord l’entrepreneuriat avec son métier de professeur à temps partiel, le temps d’obtenir une rentabilité suffisante. Mais ce cumul d’activité est limité par plusieurs facteurs :
- Obtenir l’autorisation de cumul
- Obtenir un temps partiel
- Savoir que le cumul est limité à deux ans, maximum trois ans.
Décrocher un emploi dans le secteur privé
Ce choix de quitter la fonction publique, temporairement ou définitivement, peut paraitre le plus effrayant, mais il présente plusieurs avantages.
- Avec une mise en disponibilité, il est possible de postuler pour occuper un CDD ou un CDI dans le secteur privé ou dans l’Economie Sociale et Solidaire (champ associatif notamment). Certes, il faut faire concorder l’agenda, et prévoir quelques mois de ressources financières si le poste désiré ne se présente pas de suite. En cas d’échec, le retour reste possible.
- Avec un départ définitif de l’Education nationale, par démission ou rupture conventionnelle, il devient possible d’obtenir des financements pour se former, via le plan de formation de la Région, France Travail, ou son CPF public converti en euros. Une allocation de retour à l’emploi peut s’y ajouter en cas de rupture conventionnelle, ou après 120 jours en cas de démission.
Rester enseignant après un burnout, comment poser les limites ?
Si certains professeurs sont sûrs à 100% que l’enseignant c’est fini pour eux, d’autres souhaitent prendre le temps de peser leurs motivations, et surtout de voir si, après ce grand bouleversement du burnout, ils auraient la force de revenir à l’enseignement, mais autrement.
Cet investissement différent dans le métier de professeur se construit par un retour progressif, via un temps partiel thérapeutique le plus souvent. Comment gérer son énergie, comment se protéger et dire non, comment équilibrer son temps professionnel et son temps personnel ?
Un accompagnement sous forme de coaching est alors bien adapté pour éviter de se retrouver seul dans cette phase sensible de retour à l’emploi, et pour bien poser les actions qui éviteront une nouvelle phase de surinvestissement et d’épuisement.
Une professeure des écoles de ma clientèle a fait ce choix-là. Au fil des séances elle a senti qu’elle voulait essayer de reprendre son poste, pour donner une dernière chance à ce métier qu’elle aimait, et nous avons ajusté les choses petit à petit, jusqu’à ce qu’elle trouve un équilibre satisfaisant. Elle a aujourd’hui retrouvé un bien-être professionnel, mais elle sait poser les limites nécessaires.
Conclusion : après un burnout, peut-on continuer à enseigner, ou vaut-il mieux se reconvertir ?
Vous l’aurez compris à la lecture de cet article, sortir du burnout et reconstruire son activité professionnelle est un chemin qui sera différent pour chaque personne, et qui prendra plus ou moins de temps.
Plusieurs clefs vous permettront de réussir cette renaissance professionnelle en douceur :
- Prendre le temps de bien vous connaitre et de clarifier les pistes possibles.
- Avancer par petits pas et petites étapes, une chose à la fois.
- Vous autoriser à revenir en arrière ou à essayer plusieurs choses
- Ne pas rester seul face aux doutes, aux peurs, aux étapes à franchir.
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Je suis Noémie Gasser, coach professionnelle pour les enseignants et tous ceux qui veulent se sentir mieux au travail – et dans la vie.
Après 20 ans d’enseignement, j’ai choisi de quitter l’Education nationale.
Rester ou partir, et comment faire ? Parlons-en ensemble.
Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
Noémie GASSER